Par CÉSAR PÉREZ RUIZ – Responsable des investissements et CIO – Pictet Wealth Management
Les marchés ont enregistré une reprise rapide qui les a portés vers de
nouveaux sommets. Il leur a fallu 14 semaines pour passer du sommet
à l’abîme l’année dernière, et 17 semaines pour faire le trajet inverse depuis
janvier.
Le marché haussier qui a débuté il y a 10 ans poursuit ainsi sur sa
lancée, soutenu principalement par la politique des banques centrales, et
notamment par le virage accommodant récemment initié par la Fed.
Les titres de qualité et de croissance surperforment depuis le début de l’année et nous
privilégions toujours les sociétés possédant un pouvoir de fixation des prix.
Pour la suite, nous resterons attentifs à trois éléments:
1. L’intervention des banques centrales, et notamment le fait qu’elles
continuent de soutenir les marchés, voire si elles abaissent leurs taux à
ce stade du cycle. Les anticipations d’inflation constitueront à ce titre le
principal indicateur à suivre, et plus particulièrement le taux d’inflation
«à cinq ans dans cinq ans» de Mario Draghi. Nous maintenons dès lors
notre scénario central selon lequel la Réserve fédérale américaine (Fed) et la
Banque centrale européenne (BCE) n’abaisseront pas leurs taux cette année,
sous réserve que les anticipations d’inflation ne chutent pas.
2. La situation du secteur manufacturier demeure très différente de celle
du secteur des services, le premier étant plutôt tributaire de la demande
extérieure et le second de la demande intérieure. Dans certains pays
d’ailleurs, le secteur manufacturier est frappé de récession, tandis que
les services continuent de bien se porter. Voilà qui explique pourquoi
des marchés comme la Corée du Sud ou Taïwan, qui auraient dû
participer à la reprise actuelle, sont restés sur la touche. Dans ce contexte,
nous privilégions les pays engagés dans une politique d’expansion
budgétaire, avec des mesures de relance nationales destinées à stimuler la
consommation des ménages. Cela concerne notamment les Etats-Unis et
la Chine, mais peut-être aussi la France maintenant qu’Emmanuel Macron
vient de lancer une vague de réformes.
3. Les révisions à la baisse des résultats ont marqué le pas et la saison de
publication des résultats du 1er trimestre s’est avérée étonnamment positive.
Leur progression devrait être légèrement meilleure en 2019, en raison
principalement du dynamisme du secteur énergétique. Alors que les
résultats commencent à repartir à la hausse dans certains pays, les marchés
pourraient globalement se stabiliser, voire terminer l’année en hausse. Cela
étant, les valorisations paraissent de plus en plus élevées et ont désormais
atteint leur juste valeur par rapport aux obligations à long terme.
Avec un crédit qui s’est fortement redressé cette année, le moment est venu
de miser sur la qualité par l’entremise d’une duration courte en portefeuille.
Nous restons très optimistes à l’égard des hedge funds et des actifs alternatifs.
Alors que les niveaux de corrélation reculent, le marché devient favorable
aux adeptes de la sélection des titres, qui doivent miser sur une approche
bottom-up pour surperformer.
Les marchés sont remontés trop vite et une consolidation est nécessaire.
Dans un contexte de faible volatilité, nous avons mis en place quelques
mesures de protection au sein de nos portefeuilles pour parer à tout dérapage
éventuel ces prochaines semaines, comme l’escalade des tensions avec
l’Iran, le maintien voire le durcissement du conflit commercial ou d’autres
déconvenues du même type. Cela étant, à supposer que ces dérapages soient
évités, les perspectives seront alors positives pour le restant de l’année.
En résumé
Les conditions s’améliorent pour les marchés actions
L’indice mondial de révision des bénéfices de Citigroup (Citigroup Global Earnings Revision Index) a entièrement rattrapé le terrain perdu ces neuf derniers mois, période durant laquelle les révisions à la baisse des bénéfices se sont avérées plus nombreuses que celles à la hausse. Mais la tendance s’est (légèrement) inversée et après une saison de publication des bénéfices du premier trimestre meilleure que prévu, les analystes revoient leurs attentes à la hausse. Toutefois, compte tenu de l’évolution récente des négociations commerciales, nous demeurons prudents à l’égard des actions.
Il y a très peu de catalyseurs pour le marché des changes dans l’environnement attentiste actuel. En effet, s’établissant à 6,16%, la volatilité implicite des principales devises vis-à-vis du dollar se situe à son plus bas niveau depuis 2014. La réduction de la volatilité des devises sous l’effet du virage accommodant amorcé par la Réserve fédérale américaine (Fed) se voit en outre dans la baisse de la volatilité des options à la monnaie à 1 mois sur la parité EUR/USD depuis le début de l’année.