Par Pierre-Antoine Dusoulier, CEO d’iBanFirst
L’or est le grand vainqueur de cette année qui a vu les parts de marché subir de plein fouet l’impact de la COVID-19 et le taux d’intérêt d’épargne atteindre le point zéro dans bon nombre de banques. La valeur du métal précieux a augmenté d’environ 30 % en 2020. Cette semaine, le seuil magique de 2 000 dollars américains (USD) a été atteint. La question est de savoir si cette course va s’interrompre. Les analystes de la banque d’affaires Bank of America prédisent déjà que le prix de l’or va continuer de s’approcher des 3 000 USD dans les dix-huit mois à venir.
La chasse aux records caractérisant l’or ne peut être dissociée de la chute de la devise américaine. La hausse du prix de l’or est plus impressionnante encore du fait de la baisse du dollar. Exprimée en dollars, la valeur du métal précieux a pris 20 % en deux mois. Exprimée en euros, cette hausse se maintient à moins de 10 %.
Une dette colossale
La baisse du dollar explique également la hausse du prix de l’or. De plus en plus de gens s’inquiètent de la hausse de la dette américaine. Au cours des trois premières années du mandat de Donald Trump, la dette est passée de moins de 20 000 milliards à 23 000 milliards. Les mesures de relance de l’économie étant inconnues suite à la pandémie de COVID-19, cette somme s’élève à environ 27 000 milliards cette année. Bientôt, la dette nette sera environ 1,2 fois plus élevée que le volume de l’économie américaine. À titre de comparaison, ce ratio sera de 0,6 aux Pays-Bas à la fin de l’année 2020 et 0,75 en Allemagne. Vu sous cet angle, il n’y a rien d’étonnant à ce que de nombreuses instances considèrent maintenant l’or comme un investissement plus sûr que le dollar.
Dépréciation américaine
Les agences de notation ont également des doutes quant à la politique financière des États-Unis. Il y a quelques jours, l’agence Fitch a abaissé la perspective du pays de stable à négative. C’est la première étape vers un abaissement de la note AAA de la dette souveraine des États-Unis. Dans ce cas, les investisseurs demanderaient un paiement d’intérêts supérieur aux 0,5 % qu’ils reçoivent actuellement pour les obligations américaines à 10 ans.
Bien évidemment, les États-Unis ne restent pas sans rien faire. Plusieurs mesures sont envisagées pour contenir la dette, en augmentant les charges et en limitant les dépenses par exemple. Toutefois, ce sont là des mesures impopulaires qui, de surcroît, tuent dans l’œuf la reprise économique.
Prévisions en matière d’inflation
On craint également que la Réserve fédérale américaine laisse l’inflation augmenter considérablement dans les années à venir, phénomène par lequel on acquiert moins de biens ou services pour une même somme d’argent.
Pour une inflation moyenne de presque 3 %, le pouvoir d’achat de votre argent baissera d’un quart en dix ans. Ce phénomène est ennuyeux pour quelqu’un qui, par exemple, comptait s’enrichir avec la perspective de percevoir des revenus de retraite sûrs. En revanche, l’inflation est favorable pour une personne endettée : en effet, le pouvoir d’achat de la somme d’argent qu’elle devra rembourser à l’avenir baisse également.
Le monde des devises est lui aussi très attentif aux prévisions relatives à l’inflation américaine. Si cette hausse de l’inflation se poursuit, le dollar en baisse et le prix croissant de l’or vont continuer de faire les gros titres des journaux financiers.