Après 16 ans sous la houlette d’Angela Merkel, les Allemands se sont rendus aux urnes hier pour élire leur nouveau gouvernement. L’alliance de centre droit CDU/CSU a perdu des voix au profit des sociaux-démocrates de centre gauche, qui ont terminé en tête des scrutins. Les marchés peuvent se réjouir : le scénario d’une coalition de trois partis de gauche semble avoir été évité, au lieu de quoi tout porte à croire que nous nous dirigeons vers une coalition en feu tricolore entre le SPD, les écologistes et les libéraux. Pendant ce temps, la croissance économique allemande fléchit, comme c’est le cas partout en Europe. Les taux obligataires allemands ont augmenté mais devraient rester solidement ancrés en territoire négatif pour le moment. Les indices des directeurs d’achat publiés la semaine dernière en Europe se sont révélés moins bons que prévu à cause des pénuries d’offre, alors même que la demande reste forte. Dans la mesure où ces pénuries d’offre s’éternisent et que rien n’indique qu’une solution sera trouvée rapidement, nous maintenons une duration courte au niveau de notre exposition obligataire.
Evergrande, le promoteur immobilier le plus endetté au monde, met à rude épreuve les nerfs ceux qui investissent dans les marchés financiers chinois : les pouvoirs publics font main basse sur les revenus du groupe, qui devra bientôt faire face à de nouvelles échéances de remboursement. Les autorités chinoises s’efforcent de trouver une solution, mais les créanciers obligataires d’Evergrande attendent toujours de percevoir le coupon de USD 84 millions sur une obligation en dollars qui leur était dû jeudi dernier. Dans le cas où une solution serait trouvée, il y a fort à parier qu’elle bénéficierait aux sous-traitants du groupe et aux acheteurs de ses appartements, au détriment de ses actionnaires et de ses créanciers obligataires. Nous sous-pondérons les actions chinoises en portefeuille. Dans un autre registre, afin de lutter contre la spéculation sur les cryptomonnaies, le gouvernement chinois a annoncé la semaine dernière que les transactions liées aux cryptomonnaies sont désormais illégales. Compte tenu de la dynamique actuelle, nous continuons pour le moment à tabler sur une hausse des cours des obligations d’État chinoises.
Lors de réunions la semaine dernière, les banques centrales du monde entier ont quelque peu durci leur rhétorique. Suite à un nouveau graphique à points (« dot plot ») de la part de la Réserve fédérale, les marchés tablent désormais sur une hausse des taux dès fin 2022. Pour sa part, la Norges Bank est devenue la première banque centrale importante dans le monde développé a relever ses taux dans un contexte marqué par le rebond de la croissance économique et par le creusement des déséquilibres financiers. La banque centrale du Brésil a rehaussé ses taux de 100 points de base (pb) sur fond de pressions inflationnistes persistantes. Il s’agit de la cinquième hausse depuis le début de l’année. À l’inverse, la banque centrale turque a abaissé son taux directeur de 100 pb afin de doper la croissance bien que l’inflation s’envole. Nous sous-pondérons les marchés émergents en portefeuille. Le ralentissement des indicateurs économiques en Europe et la contraction de ventes de logement aux États-Unis nous poussent à la prudence, car les banques centrales auront bien du mal à réorienter leurs politiques monétaires, surtout si leur réduction des achats d’actifs (« tapering ») se fait à un rythme soutenu, comme tout le porte à croire.
César Perez Ruiz, Responsable des investissements
et CIO chez Pictet Wealth Managemen