Par S. Déo & H. Goulletquer – Stratégistes de la gestion – LBPAM ( La Banque Postale AM)
Un ralentissement, pas une récession
Les derniers PMI, ont été décevants et se sont inscrites en baisse.
La tendance est bien établie en Europe alors qu’aux États-Unis la chute a été plus soudaine en décembre. Dans un contexte plus large, les indices de surprises économiques sont en territoire nettement négatif en Europe et aux États-Unis.
Dans le cas de la Zone Euro on peut espérer une amélioration de la croissance après les deux derniers trimestres de 2018 particulièrement faibles. Ceci était dû en partie à des effets transitoires : secteur automobile, prix du pétrole élevé et problèmes sociaux en France. Même avec une petite accélération
Le PIB de la zone ne gagnerait que 1,2% en 2019 alors que le consensus attend toujours 1,6%. Nous anticipons également un tassement aux États-Unis avec une croissance attendue de 2,5% (consensus à 2,5%).
Il y a trois messages principaux.
D’abord, 2019 s’inscrit en décélération par rapport à 2018. Ensuite, il est important de souligner que, malgré la décélération, la probabilité d’une récession à un an reste faible. Finalement le consensus est trop haut et devrait s’ajuster, même si les marchés, eux, l’ont déjà intégré.
En Chine, le ralentissement séculaire se poursuit. Le risque est la guerre commerciale avec les Etats-Unis qui aurait un impact majeur sur l’activité (estimé par la PBOC à 1,4 points de PIB). En l’absence d’escalade marquée de la guerre commerciale, les mesures de relance économique devraient stabiliser la croissance à 6,0% en 2019.
Notre lecture du marché et nos allocations
Tout au long de 2019 la croissance ralentit. Mais en fin d’année les anticipations d’un environnement économique restant favorable sont confortées par une politique économique américaine visant à stabiliser le tempo de l’activité. Si l’économie mondiale se trouve en fin de phase haussière du cycle conjoncturel, cette « fin » ne devrait pas « toucher à sa fin » à l’horizon des prochains trimestres. En Europe, les tensions politiques passent au deuxième plan. Sous ce scénario, les taux longs continuent de monter (plus en Zone Euro qu’aux Etats-Unis) et ce sont les marchés d’actions qui offrent les perspectives de valorisation les plus attractives.
Remarquons que nous accordons une probabilité de 60% à ce scénario central. Le scénario baissier est pondéré à 25% . Il pointe une intensification des tensions politiques , avec un impact négatif sur le commerce international, la confiance des agents économiques, la croissance et donc les choix d’investissement. Le scénario haussier (15%) est l’image inversée de celui baissier.
Marché du credit aux Etats-Unis
Rien d’urgent et aucun signe particulier de stress sur le marché du crédit. Les écarts de taux d’ailleurs restent particulièrement sages.
Le problème est la gestion de la prochaine crise.
Avec des émissions dont la qualité est discutable, avec une liquidité de marché dont on peut penser qu’elle disparaitra au moment où on en a le plus besoin et avec des entreprises qui érodent petit à petit leur position en trésorerie, il semble que le marché du credit mette en place tous les ingrédients pour qu’un accident arrive.
Il est difficile de voir le marché du credit générer tout seul une crise comme celle du subprime. En revanche le marché, à cause des fragilités qu’il est en train de construire, et à cause aussi de sa taille devenue gigantesque, pourrait constituer une caisse de raisonnante particulièrement dévastatrice lorsque la prochaine crise surviendra.
Quand l’environnement politique des marchés changent
La vision traditionnelle de la politique par le marché doit être remise en cause : état d’équilibre économique ex ante, choc et retour à la normale (peut-être un nouveau normal).
Comment prendre en compte un environnement caractérisé par un « système international multipolaire déséquilibré » et par la montée d’une « démocratie populiste » ?
le retour à une situation normale paraît devoir être une aspiration un peu vaine :
• Courtermisme et cycle moins long en interne
• Instabilité, tensions et crises dans les relations internationales.
Il y a sans doute ici trois messages pour les investisseurs :
• Restriction du choix des possibles autour du globe
• Politiques économiques hétérodoxes, instabilité des anticipations et plus grande volatilité
• In fine, pression à la baisse sue le rendement des actifs risqués ?