Alexandre Baradez, Responsable Analyses Marchés chez IG France
Même si le CAC40 s’affiche en légère baisse depuis le début du mois, on ne peut parler d’un mouvement de défiance sur l’indice français ni sur les autres indices mondiaux, le mois de mai ayant plutôt marqué une phase de consolidation pour les principaux indices européens et américains.
La raison de cette résilience vient d’abord de l’action toujours soutenue des banques centrales, le bilan de la Réserve Fédérale ayant atteint 6930 milliards$ la semaine dernière, c’est-à-dire une progression de plus de 2700 milliards$ depuis le début de la crise sanitaire. Cette progression du bilan de la Fed depuis fin février équivaut à près de 13% du PIB des Etats-Unis. Sans oublier les plans de soutien économiques.
Et le président de la Fed a déclaré hier lors d’une intervention en visioconférence devant le Comité bancaire du Sénat américain que le montant déboursé par la Fed jusqu’à présent était « plutôt modeste », sous entendant qu’un soutien important resterait en place dans les mois qui viennent et invitant la Congrès à faire plus au niveau des mesures économiques, notamment à l’attention des ménages.
Ce second trimestre marquera l’Histoire économique des Etats-Unis au fer rouge : la Fed d’Atlanta anticipe une chute du PIB de 42.8% en rythme annualisé. Le taux de chômage devrait grimper au-delà de 20%. Il est donc peu probable d’assister à un relâchement des mesures de de soutien monétaire et économiques dans les mois qui viennent.
Les lignes ont également bougé en Europe cette semaine avec l’annonce d’un plan de relance de 500 milliards d’euros initié par le couple franco-allemand permettant de lever de la dette sur les marchés financier et d’accorder des dotations aux pays et aux secteurs qui en auront le plus besoin. Même s’il faudra convaincre l’ensemble des Etats membres, il s’agit d’une avancée historique à l’échelle européenne.
L’annonce de ce plan a permis de resserrer les spread de taux souverains en zone euro. L’écart entre les taux 10 ans italiens et allemands était de 240 points de base avant l’annonce, il s’est rapproché 200 points de base hier. Ce n’est pas encore le retour à l’écart observé avant le début de la crise sanitaire en février à 130 points de base mais ce n’est pas non plus celui atteint en mars à plus de 320 points de base avant que la BCE n’annonce un programme d’urgence de 750 milliards d’euros.
Les 3 premières semaines de mai auront donc été des semaines de consolidation sur les marchés financiers après le fort rebond observé en mars et avril. La volatilité sur le SP500, mesuré via l’indice VIX, est passée de 85 à mars à moins de 30 ces derniers jours.
Nous sommes toutefois à un moment charnière pour les indices actions. Cette phase de consolidation sur les indices se fait pour beaucoup d’entre eux au contact de niveaux techniques importants (d’ancienne zones de support et qui deviennent désormais des résistances). La trajectoire des indices doit être surveillée de près car pour l’instant la phase actuelle ressemble à une consolidation après une forte poussée haussière. Et qui dit consolidation, dit potentiellement reprise du mouvement haussier à un moment donné. Mais le risque de ce genre de phase est aussi que la consolidation se transforme en sommet de moyen-terme, si de nouveaux catalyseurs haussiers n’apparaissent par rapidement.
Les tensions entre les Etats-Unis et la Chine représentent un vrai risque de formation de sommet si elles s’accroissent dans les jours qui viennent, tout comme le risque déceptif sur le front sanitaire. Les espoirs associés aux résultats d’études sur les vaccins ont généré des mouvements de hausse importants sur les indices, notamment ceux récemment annoncés par Moderna. Mais les interrogations sur la fiabilité de ces résultats soulevées par le site d’informations médicales STAT ont entraîné un mouvement de repli global des indices actions dans la foulée.
Que ce soit début avril ou mi-mai, les phases de repli du CAC40 ont été soutenues par la zone des 4200 points. Tant qu’on reste au-dessus de ce niveau, l’espoir d’une phase de consolidation avant sortie par le haut reste présent. Mais attention, un troisième test baissier des 4200 points remettrait en cause ce scénario avec risque de cassure et rechute vers les plus bas de mars…