Par Benjamin LOUVET, Gérant matières premières – OFI AM
Les taux négatifs profitent fortement aux métaux précieux. L’or est au plus haut depuis 6 ans. Le palladium dépasse régulièrement de nouveaux records. Et cela n’est pas près de s’arrêter.
Sur les marchés financiers, l’or évolue toujours à contre-courant des taux d’intérêts réels. Lorsque ces derniers baissent, l’or monte, et inversement. C’est donc sans surprise que le métal jaune a profité du récent plongeon des taux en territoire négatif pour dépasser 1 500 dollars l’once. Ce constat est logique : bien que l’or n’offre « rien » (pas de coupon ou de dividende), cet investissement reste plus intéressant que les actifs rapportant « moins que rien » (obligations à taux négatifs).
L’once d’or conserve par ailleurs un intéressant potentiel de progression dans l’actuel contexte de guerre commerciale entre la Chine et les états-Unis, qui devrait pousser la Fed à abaisser encore ses taux directeurs dans les prochains mois.
Pour cette raison, les taux réels vont continuer à plonger dans l’ensemble des économies développées et leur remontée n’est pas pour tout de suite. Les Banques Centrales sont en effet obligées de maintenir des taux bas pour permettre le refinancement à bas coût des dettes souveraines qui deviendraient sinon insoutenables. En parallèle, les mêmes Banques Centrales augmentent leurs stocks d’or physique : ensemble, elles ont acheté plus de 650 tonnes d’or en 2018, un record depuis cinq décennies. L’année 2019 est même bien partie pour établir un nouveau record.
Argent, platine, palladium : des métaux tout aussi appréciables
Dans la catégorie des métaux précieux, d’autres actifs méritent également d’être pris en considération. L’argent est historiquement corrélé à l’or, mais a connu une désaffection des investisseurs ces dernières années à cause d’une situation de surproduction. Celleci laisse désormais place à un effet de rattrapage : au cours du mois dernier, l’argent a enregistré une performance supérieure à celle de l’or et son potentiel est loin d’être épuisé.
Le platine a quant à lui connu un parcours difficile au cours des dernières années. Ce métal, utilisé dans les pots catalytiques de moteurs diesel, a souffert des scandales du « dieselgate » qui ont provoqué une baisse de la demande. La surproduction de platine va néanmoins être réduite grâce à la fermeture prévue de plusieurs mines. Les perspectives sont désormais positives même si le platine ne devrait pas s’envoler immédiatement sur les marchés.
Enfin, le palladium a connu un chemin inverse à celui du platine. Ce métal, utilisé dans la fabrication de pots catalytiques de moteurs à essence, a au contraire profité du « dieselgate » en bondissant de plus de 100 % sur les trois dernières années. Le palladium, dépassant régulièrement de nouveaux sommets, a atteint son dernier record en juillet 2019 à 1 600 dollars l’once. La demande pour ce métal continue d’augmenter alors que la production stagne.
On notera que les cours du palladium et du platine restent liés au dynamisme du secteur automobile. Or, l’actuel repli des ventes de voitures en Chine est déjà largement intégré sur les marchés, ce qui devrait permettre de réduire considérablement le potentiel baissier sur ces métaux.
En somme, les métaux précieux bénéficient d’une conjoncture des plus favorables tout en offrant une bonne visibilité pour les années à venir. Les taux réels resteront d’autant plus bas en Europe que les principaux états membres s’apprêtent à desserrer quelque peu les vannes des dépenses budgétaires, ce qui devrait se traduire par un peu plus d’inflation à l’avenir. En l’absence d’évolution des taux nominaux, les taux réels plongeront encore davantage en territoire négatif, ce qui devrait profiter aux investisseurs exposés aux métaux précieux.