Alexandre Baradez, Responsable Analyses Marchés chez IG France | |||
Des indices actions européens qui effacent deux mois de hausse en quelques jours seulement, des taux en chute libre, des signaux macroéconomiques toujours défavorables…le mois d’août pourrait encore réserver de mauvaises surprises sur les marchés.
Le taux 10 ans allemand a touché un nouveau plus bas historique à -0.61% mercredi, le 10 ans français a également touché son plus bas historique à -0.35%, la courbe des taux aux Etats-Unis continue de s’écraser, traduisant les craintes aigües d’une récession dans les trimestres à venir.
Quelques repères sont importants pour apprécier l’extrémité de la situation actuelle : mercredi le taux 2 mois américain s’affichait en séance à 2.06% quand le taux 30 ans s’affichait à…2.15%. Moins de 0.10% d’écart entre un taux 2 mois et un taux 30 ans ! Ce qui traduit d’un côté les craintes d’un ralentissement économique à venir et de l’autre le risque d’un accident de politique monétaire.
Et les chiffres économiques ne permettent pas d’entrevoir d’amélioration à court terme. La production industrielle allemande connait son plus fort repli en une décennie. Ce qui signifie qu’il faut remonter à la crise des subprimes pour retrouver des niveaux aussi prononcés de repli. Le sentiment des investisseurs continue de chuter en zone euro : il vient d’atteindre son plus bas niveau depuis octobre 2014. Et malgré les craintes d’une récession en Allemagne dans les mois qui viennent, toujours aucun signe de l’exécutif allemand sur une éventuelle relance budgétaire, appelée de leurs vœux par les voisins européens et la BCE qui porte presque à elle-seule le poids de la relance en zone euro depuis la crise de la dette.
Les baisses de taux plus fortes qu’attendu de plusieurs banques centrales cette semaine renforce le sentiment d’une situation économique mondiale qui se dégrade. Au premier semestre, la rhétorique accommodante des banquiers centraux, même sans action immédiate mise en place, a été achetée par les marchés actions. Mais dès qu’elles ont commencé à agir, comme la Réserve Fédérale il y a quelques jours, le marché a semblé prendre conscience que cela « officialisait » le ralentissement économique, avec ses impacts à venir sur les résultats des entreprises, et donc que cela ne justifiait plus certains multiples de valorisation.
Des signaux techniques pointent également dans le mauvais sens pour les marchés actions : les points bas touchés sur les indices de volatilité, et notamment sur le VIX qui est le plus surveillé, se redressent depuis 2017. Le SP500 a marqué successivement plusieurs sommets historiques, mais cela s’est fait dans un environnement de redressement des creux de volatilité, traduisant une nervosité en hausse malgré les records atteints.
Les dernières données « soft » en provenance des Etats-Unis, même si le mois de juillet a été plutôt positif en termes de chiffres finaux par rapport au consensus, traduisent toujours un climat des affaires qui se dégrade, ce qu’on voit au travers des derniers indices ISM (manufacturier et non-manufacturier) ou PMI notamment.
L’attention des marchés s’est également portée sur la Chine ces derniers jours et notamment sur le yuan : ce sera très probablement un baromètre pour les marchés dans les jours qui viennent. Le décrochage du yuan en août 2015 sur intervention des autorités chinoises avait déclenché un pic de volatilité sur les marchés mondiaux.
Le mois d’août est donc clairement un mois à risque pour les marchés : les prochaines réunions de la Fed et de la BCE ne sont qu’en septembre, de même pour les prochaines phases de négociations commerciales entre les Etats-Unis et la Chine. La passerelle estivale entre août et septembre semble bien fragile….