Franck Dixmier, directeur des gestions obligataires d’AllianzGI
La réunion du FOMC des 18-19 décembre 2018 est très attendue sur fond de divergences marquées entre les anticipations des marchés d’un côté et l’analyse de la Fed, telle qu’elle ressort de ses prévisions de septembre dernier et des récentes déclarations de ses membres, de l’autre.
Au cours des dernières semaines, sur fond de tensions commerciales entre les Etats Unis et la Chine, des inquiétudes sur la croissance américaine ont pris le dessus dans un contexte de forte volatilité et de correction des marchés d’actions. Le scepticisme sur la capacité de la Fed à poursuivre sa politique de resserrement monétaire s’est ainsi emparé du marché, s’illustrant de manière concomitante par une ré-évaluation à la baisse des anticipations de hausses des taux Fed funds (avec une probabilité de 70% pour une hausse en décembre, mais pratiquement plus aucune en 2019, voire une première baisse dès 2020), une baisse des anticipations d’inflation et l’aplatissement violent de la courbe des taux américaine.
Face à ces dernières évolutions, les décisions de la Fed pourraient créer un mouvement de marché car, en réalité, un certain nombre d’indicateurs, sur lesquels la banque centrale fonde son analyse, donnent une lecture différente. Ils attestent de la bonne santé, voire de la robustesse, de l’économie américaine : un PMI à 54,7% fin novembre, une confiance des consommateurs élevée, des commandes à l’industrie qui rebondissent (+3,4% fin octobre contre 1,5% fin septembre), un taux de chômage à son plus bas niveau (3,7%) depuis près de 50 ans, des salaires bien orientés qui progressent de 3,1% sur 1 an à fin novembre et un pouvoir d’achat des ménages qui devrait être dopé par la baisse du prix du pétrole.
Se fondant sur la réalité des chiffres, la Fed devrait donc maintenir le cap du resserrement monétaire en confirmant sa stratégie de hausse des taux. Elle pourrait certes réviser légèrement à la baisse ses prévisions de hausses de taux pour 2019, passant de 3 hausses à 2, mais probablement pas en deçà. Il y a donc probablement un facteur de surprise attaché à cette réunion du FOMC : les investisseurs risquent d’être pris à contrepied et de réviser leurs anticipations, entrainant ainsi un regain de volatilité et une repentification de la courbe américaine.
En tout état de cause, il ne fait aucun doute qu’en se rapprochant d’une politique monétaire neutre -des Fed Funds autour de 3%- la Fed n’est plus en pilotage automatique et que chaque décision à venir sur les taux sera évaluée à l’aune des dernières évolutions macro-économiques. Ce caractère moins prévisible dans la prise de décision de la Fed alimentera à l’avenir plus de volatilité.