Analyse de Benjamin Melman, Global Chief Investment Officer-Edmond de Rothschild
Si la guerre se prolonge et s’enracine, elle maintiendra une décote sur les actifs européens ;
Le conflit a changé la perception que nous avions des risques géopolitiques après la pandémie, renforçant notamment la crainte d’une invasion de Taïwan ;
Le ralentissement de la mondialisation signifie une croissance plus faible et une inflation plus élevée, même si certains pays pourraient bénéficier du “nearshoring” ou du “friendshoring”.
La guerre a renforcé la tendance baissière sur les actifs européens, atténuée au cours des dernières semaines, grâce à un hiver doux, une baisse des prix de l’énergie et la réouverture de la Chine. Elle a également augmenté les coûts énergétiques pour l’Europe par rapport aux autres régions du monde, entraînant un désavantage structurel pour l’industrie européenne. Cette hausse du coût de l’énergie a accentué les pressions inflationnistes en Europe et justifie une prime sur les perspectives inflationnistes européennes et donc une certaine décote sur les actifs européens. Certaines entreprises ont utilisé leur pouvoir de fixation des prix pour augmenter leurs marges, mais il s’agit plutôt d’un phénomène ponctuel, car l’excès d’épargne s’estompe. Il semble qu’il sera beaucoup plus difficile d’augmenter les prix de vente que l’année dernière. Si la guerre se prolonge et s’enracine, elle maintiendra une décote sur les actifs européens.
La guerre a changé la perception que nous avions des risques géopolitiques après la pandémie. Elle a rendu possible ce qui semblait presque impossible et a donc renforcé la prise de conscience liée à une invasion potentielle de Taïwan. L’augmentation du risque géopolitique exerce une pression forte sur les stratégies des entreprises et sur l’organisation des chaînes d’approvisionnement. C’est un vent contraire important pour la mondialisation. Une mondialisation au ralenti signifie une croissance plus faible et une inflation plus élevée. Si la situation est globalement négative pour tout le monde, certains pays pourraient bénéficier du “nearshoring” ou “friendshoring” (construction de nouvelles usines plus proches géographiquement), par exemple en Europe de l’Est, en Afrique du Nord… Davantage d’usines européennes pourraient également revenir sur le Vieux Continent, mais nous devons garder à l’esprit que l’IRA américain (Inflation Reduction Act) a le pouvoir d’attirer certaines entreprises européennes aux États-Unis.