Par Nadine Trémollières, Directeur Primonial Portfolio Solutions – Primonial
D’une ampleur sans précédent, la crise sanitaire que nous sommes en train de vivre impacte profondément nos économies. En manque de repères, les marchés financiers enregistrent des fluctuations très rapides.
C’est pourquoi, pour mieux vous accompagner, nous avons décidé de vous partager tous les lundis notre éclairage sur la situation actuelle. Vous y retrouverez notamment notre sélection des principales informations économiques de la semaine écoulée et notre analyse des marchés financiers.
Environnement économique : les dernières informations
▪ Le monde entre, de façon à peu près simultanée, dans les semaines qui seront décisives pour infléchir la courbe d’expansion de la pandémie et limiter le débordement des systèmes de santé. L’Espagne est devenue le deuxième foyer – après l’Italie – en termes de nombre de morts. Le Président Américain, à l’image du Premier Ministre britannique, s’est rendu le 31 mars au consensus scientifique qui préconisait un lockdown (confinement) de plusieurs semaines. En Inde, le confinement le plus vaste au monde (1,3 milliard de personnes) a été mis en place.
Il y a désormais unanimité à la fois sur la gravité de la crise mais aussi sur une approche de type « whatever it takes » comme réponse monétaire et budgétaire.
▪ L’INSEE a publié une première évaluation de l’impact économique en France, assortie des nécessaires précautions d’usage. Il en ressort que l’activité économique et la consommation seraient à 65% de leur niveau normal. Un mois de confinement aurait pour effet une contraction de 12 points de PIB trimestriel soit 3 points de PIB annuel.
Marchés financiers
▪ Les marchés actions entament une nouvelle baisse. Le rebond des marchés financiers constaté en fin de mois ne s’est pas poursuivi, même si la baisse des marchés reste plus contenue. Les indices actions ont reculé en moyenne de 2,5 % autour du monde (entre le 30/03 et le 3/04), avec peu de différences entre les zones géographiques. Du côté obligataire,
les niveaux des taux gouvernementaux ont peu évolué alors qu’on note une légère amélioration des dettes corporate après la forte chute des dernières semaines. La situation sanitaire semble s’améliorer en Europe : même si le nombre de personnes contaminées est toujours en progression, l’accélération du nombre de cas est quant à elle moins forte. Le confinement semble apporter les résultats espérés alors que plus de la moitié de la population mondiale est invitée à rester chez elle.
▪ Le pétrole résiste. L’élément qui semble être le plus positif la semaine dernière est à mettre au crédit du rebond des prix du pétrole qui regagnent près de 20 % suite à la décision conjointe de la Russie et de l’Arabie Saoudite de reprendre leurs négociations et de se réunir cette semaine.
Rappelons que le prix du pétrole s’était effondré
d’environ 60 % depuis le début de l’année, ce qui
avait largement accéléré la baisse des indices actions.
Dans cette guerre des parts de marché que se livrent
la Russie et l’Arabie Saoudite, l’offre explose alors
que la demande est en chute libre (environ 30 %)
avec la pandémie. L’annonce, la semaine dernière,
que les grands producteurs étaient prêts à resserrer
la production d’environ 10 millions de barils par jour
a permis d’enrayer la baisse. Cependant la Russie
souhaiterait inclure les États-Unis dans ces
négociations. En effet, les producteurs de pétrole de
schiste ne sont pas soumis à ces quotas de
production, ce qui irrite très fortement les pays de
l’OPEP. Le niveau actuel des prix contraint tous les
pays, et notamment les pays du Golfe dont
l’économie est uniquement liée aux exportations de
pétrole, à trouver un accord rapide. Néanmoins, on
voit bien que l’équilibre est fragile et que la moindre
mauvaise nouvelle pourrait faire de nouveau chuter
le prix du pétrole.
▪ Des indices macroéconomiques à la peine. Du point de vue macroéconomique, les États-Unis ont pulvérisé le nombre d’inscriptions au chômage avec 6,6 millions de personnes ayant perdu leur emploi sur la dernière semaine, ce qui porte à 10 millions le nombre de chômeurs sur les quinze derniers jours.
En revanche, les chiffres d’activité dans l’industrie et les services ne reflètent pas encore une dégradation significative étant donné que le confinement aux États-Unis est encore récent et partiel.
En Europe, l’arrêt de l’activité économique se traduit d’ores et déjà dans les chiffres des PMI1 (indice des directeurs d’achat) qui se sont effondrés sur le mois de mars à 31,4 (contre 51,6 en février) préfigurant une baisse d’environ 2 % du PIB au 1er trimestre 2020.
Une plus forte contraction est attendue au cours du 2e trimestre. Cependant, la réponse des États et des banques centrales est forte et inédite, avec une prise de conscience infiniment plus rapide que pendant la crise de 2008 et une coopération ainsi qu’une solidarité plus marquées entre les États européens.
Ainsi, l’orthodoxie budgétaire fixée par les critères de Maastricht a été assouplie par la BCE et le recours au MES (Mécanisme Européen de Stabilité), voire l’émission de Corona bonds permettrait aux pays de mutualiser leurs dettes et d’éviter une augmentation de leurs taux d’intérêt.
Les conséquences sur l’économie mondiale dessinent un tableau assez sombre. Cependant la généralisation des moyens de communication modernes, et notamment du télétravail, permet de maintenir une partie de l’activité et d’atténuer à terme les conséquences économiques de cette crise sans précédent.
—-1. PMI : « Purchasing Manager’s Index » ou indice des directeurs d’achat. Un indicateur PMI à 50 signifie que l’activité n’a pas évolué par
rapport au mois précèdent. Un indicateur supérieur à 50 montre une croissance et un indicateur sous la barre des 50 indique une décroissance.