ACTION FUTURE 60
INTERVIEW de David Allouche
Propos recueillis par Jérôme Revillier
Action Future : Vous êtes l’auteur de « Marchés financiers, sans foi ni loi ? » Pourquoi ce livre ?
David Allouche : Le discours de François Hollande au Bourget en 2012, qui désignait le monde de la finance comme son adversaire, m’a étonné. Stigmatiser le monde de la finance dans son ensemble, le désigner comme bouc émissaire me semble choquant. François Hollande a surfé avec succès sur ce thème et a ranimé de vieux réflexes : le méchant marché, les méchants actionnaires, les méchants profits. Mais le phénomène d’accusation de la finance est bien plus large. On se souvient par exemple du mouvement Occupy Wall Street en juillet 2011. J’ai voulu avec ce livre questionner cette accusation d’une finance « sans foi ni loi ».
À qui s’adresse ce livre ?
À tout le monde. Ce n’est pas un ou- vrage technique mais un essai accessible au plus grand nombre. Ma belle mère l’a lu entièrement et m’a dit qu’elle avait tout compris, hormis les Crédit Default Swaps. Avec ce livre, j’ai surtout cherché à aider ceux qui veulent comprendre le rôle des marchés financiers dans l’économie. « Marchés financiers, sans foi ni loi ? » s’adresse aussi à ceux qui veulent placer leur argent et donner du sens à leur épargne. Dans notre monde postcrise des subprimes, il est urgent de donner du sens à ses placements.
De quelle façon expliqueriez-vous les origines de ce « mal français » qu’est le rejet de la finance et de toutes ses composantes ?
Le rejet de la finance en France peut s’expliquer par des raisons culturelles. Il existe dans notre pays un fond de cultures féodale, catholique et communiste qui condamnent l’argent pour différentes raisons. Le seigneur, qui veut fixer seul le prix, ne veut évidemment pas d’un prix de marché. Pour les religieux, il faut choisir entre aimer Dieu et aimer l’argent. Enfin, pour les communistes, le capital exploite le travail. L’expression de Max Weber « le marché rend libre » est une réalité historique. Le marché est libérateur en Europe, puisque ce ne sont plus les seigneurs qui fixent la valeur des choses. Mais, plus concrètement, c’est la faible culture financière des Français qui explique ce rejet. Ils ne sont pas éduqués financièrement. Et leur niveau dans ce domaine recule. Un Français sur deux ne connaît pas la différence entre une obligation et une action. Un sur quatre pense qu’un placement rentable peut être peu risqué. C’est la même chose pour les jeunes Français qui arrivent dans les classements Pisa (Program for International Student Assessment) derrière les Américains, dont on n’admire pourtant pas le système éducatif !
Vous avez collaboré avec Isabelle Prigent, spécialiste en communication financière. Sur quels aspects l’expertise d’une communicante a été le plus utile pour votre livre ?
Cet essai résulte d’une écriture à quatre mains et de la confrontation de points de vue parfois opposés. En tant que communicante, Isabelle tenait à se placer au niveau du lecteur non spécialiste. En tant que professionnelle du secteur financier, elle a nourri ce livre de ses propres interrogations sur la place de la finance et sur sa responsabilité dans notre société.
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