Par Lazard freres gestion
ÉTATS-UNIS
L’économie américaine continue de ralentir progressivement, même si elle montre par endroits des signes de résistance.
ZONE EURO
Les statistiques publiées en juin ont surpris négativement, amenant une nouvelle révision en baisse des prévisions de croissance
CHINE
Les statistiques économiques ne vont pas dans le sens d’une réaccélération de l’activité après la récession technique du début d’année.
ETATS-UNIS : RALENTISSEMENT ÉCONOMIQUE PROGRESSIF
L’économie américaine continue de ralentir progressivement, même si elle montre par endroits des signes de résistance. Avec la révision en baisse des chiffres des mois précédents, lescréations d’emplois restent sur une tendance à la décélération.
Le secteur privé a créé 149 000 emplois en juin après 259 000 en mai. La baisse des créations d’emplois a été compensée par un allongement de la durée du travail, mais le nombre total d’heures travaillées fait du surplace au deuxième trimestre, ce qui n’est pas de bon augure pour la croissance du PIB. Les données de consommation vont également dans le sens d’un ralentissement de l’économie américaine. La consommation des ménages a été révisée en baisse à +0,2% en avril et a très légèrement baissé en mai. L’acquis de croissance annualisée surla consommation n’est plus que de +0,8% pour le deuxième trimestre, après une hausse de +4,2% au premier trimestre.
Du côté des signes de résistance, le marché de l’immobilier américain affiche un rebond inattendu. L’activité reste sous pression dans l’ancien car les propriétaires ne sont pas incités à quitter leur logement compte tenu de la forte augmentation du coût du crédit. Mais la demande se reporte vers le marché duneuf, ce qui soutient l’activité des promoteurs immobiliers.
Autres signes de résistance, les commandes de biensd’investissement sont encore très dynamiques et l’ISM* non- manufacturier a rebondi de 50,3 à 53,9 en juin. Toutefois, les perspectives d’investissement sont en baisse sur les derniers mois et le niveau de l’ISM non-manufacturier reste bas hors périodes de récession.
L’inflation baissait fortement en juin à +3,0% et +4,8% hors énergie et alimentation en glissement sur un an. L’inflation desbiens a plutôt réaccéléré sur les derniers mois, mais le coût dulogement se retourne et l’inflation des services hors logement a retrouvé le bas niveau des deux dernières années en séquentiel.
Si ces chiffres vont dans le bon sens, la Fed ne sera probablement pas rassurée sur l’inflation tant que les salaires continueront d’augmenter rapidement (+4,4% sur un an en juin) ou que les conditions d’un ralentissement de ceux-ci ne seront pas réunies. Le marché du travail a commencé à se rééquilibrer mais est toujours très tendu (taux de chômage à
3,6% et encore 1,6 offre d’emploi par chômeur).
Au total, ces données vont sans doute pousser la Fed à relever ses taux directeurs à nouveau fin juillet. Le compte rendu de la dernière réunion a confirmé sa détermination à faire ralentir l’activité via de nouvelles hausses de taux, augmentant in fine le risque d’un basculement en récession de l’économie américaine dans les prochains mois. D’autant que le resserrement monétaire passé va continuer de produire ses effets et qu’à partir de l’automne, les Américains recommenceront à payer des intérêts sur les prêts étudiants, ce qui risque de peser sur la consommation.
ZONE EURO : PAS DE RÉACCÉLÉRATION DE L’ACTIVITÉ
Dans la zone euro, les statistiques économiques ne vont pas dans le sens d’une réaccélération de l’activité après la récession technique du début d’année. Les enquêtes PMI* du mois de juin faisaient état d’un nouveau repli, tant pour le PMI des services que le PMI manufacturier. À 49,9, l’indice PMI composite est passé sous les 50 pour la première fois depuis la fin de 2022. Les données de consommation ne sont pas bien orientées non plus. Après avoir fortement chuté depuis le printemps 2022, les ventes au détail hors automobiles ont fait du surplace aux mois d’avril et
de mai. Les ventes d’automobiles ont atteint un point haut en décembre dernier, mais baissent régulièrement depuis. Sauf rebond très fort en juin, la consommation des ménages devrait donc encore peser sur la croissance au deuxième trimestre,
comme aux deux derniers trimestres.
L’inflation élevée continue d’éroder le pouvoir d’achat des ménages européens. Les chiffres d’inflation de mai et juin, bien qu’un peu plus faibles que les mois précédents, restaient forts à +5,5% au total et +5,4% hors énergie et alimentation en glissement sur un an. La vigueur de l’emploi et des salaires demeure un facteur de soutien, mais un tel écart entre la dynamique d’activité et d’emploi n’a pas vocation à durer. On
commence d’ailleurs à observer des premiers signes de ralentissement de l’emploi dans les enquêtes et dans les chiffres mensuels que publient certains pays comme l’Allemagne.
Si les ménages américains ont nettement eu recours à l’épargne accumulée pendant la pandémie pour amortir la baisse de leur pouvoir d’achat, il ne semble pas en être de même en Europe.
La BCE estime que le stock d’épargne excédentaire accumulé par les ménages européens entre le premier trimestre 2020 et le quatrième trimestre 2022 a augmenté régulièrement pour atteindre 11,3% du revenu disponible. Cela constitue une
réserve importante de consommation, mais la partie la plus liquide de cette épargne (numéraire et dépôts) aurait déjà été mobilisée et le reste aurait été consolidé en patrimoine (immobilier, épargne financière). En outre, cette épargne serait détenue aux deux-tiers par les ménages les plus aisés.
Le ralentissement de l’activité et les premiers signes de détente sur le marché du travail ne seront probablement pas suffisants pour dissuader la BCE de poursuivre la remontée de ses taux d’intérêt. Lors du forum de la BCE à Sintra, Christine Lagarde a réitéré qu’une nouvelle hausse des taux était quasi-certaine en juillet à cause de la persistance de l’inflation, tout en soulignant des incertitudes sur le point haut des taux et sur la durée de leur maintien à ce niveau. Le marché attend un point haut sur le taux de dépôt à 4,00% à la fin de l’année, soit encore deux hausses de +25 points de base. Les baisses de taux interviendraient à partir du premier semestre de l’année ,prochaine.
CHINE : POURSUITE DU RALENTISSEMENT ÉCONOMIQUE
Les statistiques publiées en juin ont surpris négativement, amenant une nouvelle révision en baisse des prévisions de
croissance. Le consensus Bloomberg attend désormais une hausse du PIB d’environ 3,0% en rythme annualisé au deuxième trimestre contre environ 5,0% un mois plus tôt. Cela constituerait un ralentissement marqué par rapport à la croissance enregistrée au premier trimestre. Le PIB avait augmenté d’un peu moins de 10% après la levée complète des restrictions sanitaires en décembre 2022.
La déception porte notamment sur la publication des chiffres d’activité de mai. Si la réouverture de l’économie semble continuer à soutenir la production de services (+11,7% sur un an) et les ventes au détail (+12,7% sur un an), les autres indicateurs étaient plus faibles. La production industrielle n’était qu’en légère hausse (+3,5% sur un an), les exportations baissaient (-7,5% sur un an) et le secteur de l’immobilier restait sous pression. Les ventes de logements en volume se repliaient nettement (-16,0% sur un an) de même que l’investissement en immobilier (-10,2% sur un an).
Le taux de chômage baissait à 5,2% en mai tandis que le taux de chômage des jeunes (16-24 ans) continuait d’augmenter pour atteindre un nouveau record à 20,8% (contre 12,2% en décembre 2019). La forte augmentation du taux de chômage des jeunes est liée à plusieurs facteurs amenant un déséquilibre entre l’offre et la demande de travail. Côté offre, le marché connaît un afflux croissant de jeunes diplômés. Côté demande, les restrictions sanitaires ont durement touché le secteur des services, qui a tendance à embaucher davantage de jeunes travailleurs, et les changement règlementaires intervenus ces dernières années ont pu réduire les débouchés traditionnels (éducation, internet, finance, immobilier par exemple).
Les chiffres d’inflation du mois de mai étaient inférieurs aux attentes et sur des niveaux faibles, illustrant une économie quitourne en-dessous de ses capacités. L’inflation était nulle et ralentissait à +0,7% hors énergie et alimentation en glissement sur un an. Les indices PMI ne montraient pas d’amélioration de
la conjoncture au mois de juin. Si l’on fait la moyenne des enquêtes PMI officielles et de Caixin, le PMI manufacturier était globalement stable à 49,9 et le PMI des services baissait de 55,5 à 53,4.
Ce contexte semble commencer à inquiéter les autorités, à en juger par le renforcement récent des mesures de soutien. Celles-ci sont restées relativement mesurées au cours des derniers mois et concernaient surtout le secteur de l’immobilier. L’idée n’est sans doute pas de stimuler massivement l’économie par ce biais, mais plutôt d’assurer un désendettement ordonné des promoteurs immobiliers. Le marché s’attend à de nouvelles mesures, mais une relance budgétaire massive semble peu probable. Les marges de manœuvre du gouvernement sont en effet plus limitées que par le passé, la dette publique ayant déjà beaucoup augmenté au cours des dernières années
Les sujets de Lazard Freres